Le conflit en Ukraine montre un président russe contre le reste du monde. Cependant, l’homme fort du Kremlin n’est pas un homme seul et bénéficie du soutien de quelques fidèles alliés russes.
La troisième guerre mondiale commencera-t-elle en Ukraine?
Vladimir Poutine, est devenu le dirigeant le plus puissant au monde. Après 20 ans à la tête du pays, le président a réduit sa cour à quelques anciens du KGB. Dans son cercle proche, on trouve Sergueï Choïgou, ministre de la Défense et ami intime de Poutine. L’intervention en Syrie venait de lui et il a également obtenu du président une hausse de 30 % du budget de l’armée. Il y a également Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères depuis 18 ans. Il est obnubilé par un retour de l’influence perdue de la Russie.
La décision d’envahir l’Ukraine traduit l’influence de ces hommes militaires russes « qui appartiennent à une génération soviétique » selon une experte. Le général Bortnikov, patron général du service secret russe et Sergueï Narychkine à la tête des renseignements extérieurs font aussi partie de l’entourage du président russe.
Poutine choisit cependant seul. Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, et le chef d’état-major des armées sont devenus, depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, des hommes de confiance de Poutine.
Quand Vladimir Poutine n’est pas seul face à l’écran, ils sont presque systématiquement là. Depuis le début de la guerre en Ukraine, le ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, et le chef d’état-major des armées, Valeri Guerassimov, sont devenus les visages de la guerre.
Ces deux proches du maître du Kremlin jouaient, par exemple, les faire-valoir militaires de Vladimir Poutine lorsque ce dernier a annoncé à la télévision, le 28 février, avoir mis la puissance nucléaire russe en alerte.
Pas surprenant que le Kremlin ait décidé de mettre Sergeï Choïgou et Valeri Guerassimov sur le devant de la scène. Aux yeux du président russe, ils sont les artisans de la campagne victorieuse d’annexion de la Crimée en 2014, de la stratégie militaire russe en Syrie, et du soutien des prorusses de la région du Donbass.
Ils sont aussi perçus comme faisant partie des plus fidèles parmi les fidèles de Vladimir Poutine et semblent évoluer en permanence en binôme. Ils ont, en effet, été nommés tous les deux en 2012 à quelques semaines d’intervalle à leur poste respectif, et selon un adage, Sergueï Choïgou restera en poste aussi longtemps que Valeri Guerassimov demeurera chef d’état-major et vice-versa.
Pourtant, ces deux hommes placés en première ligne pour mettre en œuvre la volonté du président russe en Ukraine ont des parcours et des profils très différents.
Sergueï Choïgou, ministre russe de la Défense
Il est l’éternel dauphin. Sergueï Choïgou est l’un des rares membres du premier cercle du pouvoir a avoir eu autant d’influence sous Boris Eltsine, à la fin des années 1990, que sous Vladimir Poutine.
Cet apparatchik a commencé sa carrière politique à la fin de l’ère soviétique, pour devenir, en 2012, un ministre de la Défense sans expérience militaire. Une particularité qui n’est pas rare sous Vladimir Poutine, soucieux d’écarter les gradés à ce poste. Mais Sergueï Choïgou n’a pas non plus l’expérience des services secrets, ce qui est beaucoup moins fréquent parmi les proches de Poutine.
Sa grande qualité est qu’il est “un serviteur pour les tsars et un père pour les soldats”, écrit le quotidien russe Moscow Times, paraphrasant le célèbre poème « Borodino », de Mikhaïl Lermontov, à la gloire de l’héroïsme de l’armée russe. Moins lyrique, Sergueï Konvis, un politicien de la région de Touva, en Sibérie, d’où Sergueï Choïgou est originaire, décrit le ministre de la Défense comme un “parfait caméléon”, capable de se transformer à volonté pour se plier au bon plaisir des dirigeants.
Ainsi, sous Boris Eltsine, il s’est fait connaître au poste de ministre des Situations d’urgence. Au tournant du XXIe siècle, cet organisme était devenu un véritable petit État dans l’État, avec plus de 350 000 hommes et même une police spécifique prête à se déployer au moindre incendie sur le sol russe. Un ministre très actif qui ne manquait pas de se déplacer sur les lieux d’un drame, ce qui lui a valu une forte popularité… et le titre de dauphin de Boris Eltsine.
Mais c’est Vladimir Poutine qui a pris le pouvoir en 2002. Sergueï Choïgou n’a pas eu l’air d’en prendre ombrage et s’est immédiatement mis au service du nouvel homme fort du Kremlin. Il a notamment dirigé le parti Russie unie, à la solde de Vladimir Poutine, afin de cimenter l’emprise du président sur le jeu politique russe.
Sergueï Choïgou a aussi invité plusieurs fois Vladimir Poutine dans sa maison à Touva, où il a organisé de très médiatiques parties de pêche.
Il n’est cependant pas qu’un courtisan hors pair. Sergueï Choïgou est décrit comme le responsable d’une vaste modernisation de l’armée russe, souligne le Guardian britannique. C’est aussi lui qui, en tant que ministre de la Défense, a supervisé le très redouté GRU – le service de renseignement militaire russe – qui est soupçonné d’avoir multiplié, dans les années 2010, les opérations d’assassinat en Europe. À commencer par la tentative d’empoisonnement à Salisburry (Angleterre) de l’ex-agent double Sergueï Skripal en 2018…
En décembre 2015, il mène l’opération militaire qui permet d’inverser le cours de la guerre civile syrienne et permet à Bachar el-Assad de reprendre la main.
Il accomplit des visites diplomatiques dans plusieurs pays comme la Syrie, le Qatar ou Israël. Alors que ce rôle devrait être alloué aux affaires étrangères plus qu’à la défense, les analystes voient en cela une plus grande importance de l’armée en Russie. Il crée un cybercommandement et intègre l’armée de l’air et les forces spatiales au sein des toutes nouvelles forces aérospatiales russes. Il fait en sorte qu’il soit pratiquement impossible pour les jeunes Russes d’échapper au service militaire.
En 2017, il fait modifier l’uniforme d’apparat de l’armée en s’inspirant de l’uniforme soviétique de 1945, surnommé « l’uniforme du vainqueur ». Il supervise le GRU, service de renseignement militaire russe soupçonné d’avoir multiplié, dans les années 2010, les opérations d’assassinat en Europe. Il est soupçonné d’avoir multiplié, dans les années 2010, les opérations d’assassinat en Europe. À commencer par la tentative d’empoisonnement à Salisburry (Angleterre) de l’ex-agent double Sergueï Skripal en 2018…
Il apparaît comme « l’homme qui a replacé l’armée dans les plus hautes sphères du Kremlin, au détriment des services d’espionnage », ou encore « le symbole de la militarisation de la Russie ».
Valeri Guerassimov chef d’état-major des armées russes
L’actuel chef d’état-major des armées est un mythe. Non pas que Valeri Guerassimov n’existe pas. Ce militaire de carrière né en 1955 à Kazan – l’une des villes les plus peuplées de Russie après Moscou – a bel et bien servi dans les divisions blindées de l’armée rouge sur tout le territoire de l’ex-Union soviétique.
Valeri Guerassimov a également été l’un des commandants de l’armée du Caucase du Nord durant la seconde guerre de Tchétchénie (1999-2009). À cette occasion, il s’est attiré les louanges de la célèbre journaliste et critique du pouvoir russe Anna Politkovskaïa – assassinée en 2006 – qui a dit de lui qu’il était l’exemple “d’un homme qui a su préserver son honneur d’officier” durant cette guerre, a raconté la BBC en 2012. Son fait d’armes : avoir fait arrêter et condamner un soldat russe accusé d’avoir brutalisé et assassiné une jeune tchétchène durant le conflit.
Et il ne fait nul doute que c’est ce général, décrit par Sergueï Choïgou comme un “militaire de la tête à la pointe des pieds”, qui est le chef d’état-major de toutes les armées russes depuis 2012. C’est lui qui a mené les opérations en Ukraine en 2014, en Syrie et aujourd’hui de nouveau en Ukraine.
Mais sa renommée internationale repose sur un mythe, ou plus exactement un malentendu. Valeri Guerassimov est considéré comme le père d’une doctrine militaire qui, en réalité, n’existe pas ou a été mal comprise. C’est lui qui serait l’inventeur de la “guerre hybride” russe, celle qui mélange le recours aux armes conventionnelles à des méthodes non-militaires – comme la désinformation, ou les cyberattaques – pour préparer le terrain aux soldats. Il existe même une “doctrine Guerassimov” pour désigner cette approche militaire.
Sauf que l’inventeur de ce terme, le spécialiste britannique des questions militaires russes Mark Galeotti, a maintes fois tenté de rectifier le tir, assurant qu’il n’existait pas de telle doctrine officielle en Russie. Et que Valeri Guerassimov n’a, de toute façon, rien d’un théoricien de la guerre.
Tout vient à l’origine d’un discours prononcé par ce dernier en 2013, dans lequel il assure que la “frontière entre les temps de guerre et de paix était devenue de plus en plus floue” et que les “moyens non-militaires pour atteindre des objectifs stratégiques avaient gagné en importance”.
Un discours qui, après l’annexion de la Crimée où de tels moyens non-conventionnels (propagande pro-russe en Ukraine, création d’incidents pour justifier des buts de guerre) ont été appliqués, a paru prophétique aux observateurs.
La “doctrine Guerassimov” venait alors de gagner ses lettres de noblesse et le discours du chef d’état-major était étudié de très près à Washington, raconte le Financial Times. Sauf que l’analyse de Valeri Guerassimov “ne décrivait pas comment l’armée russe devait agir, mais comment ce militaire pensait que l’Occident opérait”, souligne Ruslan Pukhov, directeur du Centre russe d’analyse des stratégies et des technologies, interrogé par le Financial Times. En clair, Valeri Guerassimov pensait que cette “guerre hybride” était ce que les États-Unis avaient utilisé pour fomenter les printemps arabes et que Washington cherchait à la mettre en pratique contre le pouvoir en place à Moscou.
Ce militaire n’était donc pas le visionnaire et grand stratège que l’Occident redoutait. “Malheureusement, comme le monstre échappé d’un film d’horreur, cette idée d’une doctrine de ‘guerre hybride’ a pris corps dans les cercles d’analystes à Washington et des réflexions entières ont été menées dans lesquelles la ‘doctrine Guerassimov’ fait figure de pièce centrale de ‘théorie du chaos’, selon laquelle la Russie cherchait à semer le désordre mondial”, souligne Michael Kofman, l’un des plus grands spécialistes américains de l’armée russe. Valeri Guerassimov et sa mythique doctrine incarnait le retour du grand méchant russe, “alors qu’il ne l’avait probablement même pas écrit lui-même ce fichu discours”, conclut Mark Galeotti.
Alexandre Vassilievitch Bortnikov, le patron du FSB (ex KGB)
Né en 1951 à Molotov (aujourd’hui Perm), Alexandre Vassilievitch Bortnikovest un général d’armée. En 1975, il sort diplomé de l’École supérieure du KGB. Il entre au contre-espionnage. Il réalise une grande partie de sa carrière à Léningrad durant la période soviétique. Quand rencontre-il Vladimir Poutine, ancien membre du KGB ? Vladimir Poutine devient le patron du FSB à la fin des années 90 avant de devenir le Premier ministre de Boris Eltsine.
Alexandre Vassilievitch Bortnikovdevient un fidèle de Poutine et devient le directeur du FSB en 2008. Il est le vrai patron des services secrets russes. Depuis le 26 juillet 2014, l’Union européenne l’a interdit de visa dans le cadre des sanctions occidentales à l’encontre de la fédération de Russie concernant la crise ukrainienne de 2013-2014.
En mars 2021, le département d’État des États-Unis et le Trésor américain sanctionnent Bortnikov pour son implication présumée dans l’empoisonnement d’Alexei Navalny.
Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères depuis 18 ans
« Il terrorise tout le monde » Sergueï Lavrov est le leader de la diplomatie russe depuis 2004. Gérant les Affaires étrangères d’une main de fer, il est craint dans le monde entier.
C’est l’un des hommes les plus proches de Vladimir Poutine. Sergueï Lavrov mène la diplomatie russe. C’est le plus ancien de ses ministres, gérant les Affaires étrangères depuis 18 ans. Il a été nommé en 2004 et a vu passer sept Secrétaires d’Etat américains depuis, et autant de ministres français au Quai d’Orsay. Tout cela à travers les crises successives: la guerre avec la Géorgie, l’annexion de la Crimée ou encore le conflit syrien.
A 72 ans, il est le messager de Poutine à travers le monde. Un messager inflexible, décrit comme particulièrement austère. Il inspire à ses interlocuteurs plus de crainte que de sympathie. On le surnomme « monsieur ‘niet' », « non » en russe, pour le nombre de vetos qu’il a brandis au Conseil de sécurité de l’ONU.
Il n’est pas du clan traditionnel de Vladimir Poutine, des anciens de Saint-Pétersbourg. Il n’est pas non plus un ancien du KGB… C’est un pur diplomate de carrière. Né à Moscou, diplômé du très élitiste Institut d’Etat des relations internationales, il a pris son premier poste au Sri Lanka puis a été nommé aux Nations Unies, où il a représenté la Russie pendant 10 ans.
C’est à New York qu’il va faire sa réputation: 1m88, l’homme impressionne. Pour lui, la diplomatie est une guerre de tranchées et il n’hésite jamais à mépriser ouvertement ses interlocuteurs. Il est même devenu une figure de la propagande russe. On trouve même à Moscou des t-shirts à son effigie dans les boutiques de souvenirs, aux côtés de Vladimir Poutine et de Youri Alekseïevitch Gagarine, pilote et cosmonaute soviétique, premier être humain à avoir effectué un vol dans l’espace au cours de la mission Vostok 1, le 12 avril 1961, dans le cadre du programme spatial soviétique. Il est mort le 27 mars 1968.
Dmitri Medvedev, proche parmi les proches de Vladimir Poutine
Dmitri Anatolievitch Medvedev ou Dimitri Medvedev, Premier vice-président du gouvernement russe à partir de 2005, il est élu à la présidence de la fédération de Russie en 2008. Il nomme alors à la présidence du gouvernement son prédécesseur, Vladimir Poutine, qui ne pouvait effectuer plus de deux mandats consécutifs.
En tant que chef de l’État, il mène une politique davantage tournée vers le libéralisme et la technologie. Il s’efface au profit de Vladimir Poutine pour l’élection présidentielle de 2012.
Il est nommé à son tour président du gouvernement en 2012, lorsque Vladimir Poutine retrouve les fonctions de président de la Russie. Dmitri Medvedev devient par ailleurs président du parti présidentiel, Russie unie. Il est reconduit dans ses fonctions en 2018, après la réélection de Vladimir Poutine. Il démissionne de la tête du gouvernement en 2020 et est nommé vice-président du Conseil de sécurité. Autrefois jugé trop mou, Medvedev semble s’être endurci. Vice-président du conseil de sécurité, il vient d’exiger le retour de la peine de mort pour les traîtres.
Poutine désigne comme nouveau Premier ministre le patron du fisc russe, Mikhaïl Michoustine, un inconnu du grand public. Quant à Dmitri Medvedev il lui a proposé le poste de vice-président du Conseil de sécurité russe, un organe que le chef de l’Etat préside.
Vladimir Poutine, 23 années au pouvoir en Russie
Vladimir Poutine, plus vingt ans au pouvoir en Russie. Une place que l’homme fort du pays semble déterminé à garder, malgré une contestation l’opposition russe.
Boris Eltsine annonce le 9 août 1999 qu’il nomme le directeur du FSB, Vladimir Poutine, à la tête du gouvernement. Vingt deux ans plus tard, le natif de Saint-Pétersbourg gouverne plus que jamais sans partage.
Nommé Premier ministre le 9 août 1999 par Boris Eltsine, Vladimir Poutine rendait ainsi au peuple russe, sa fierté nationale. Plus vingt ans plus tard, l’homme fort du pays, populaire pour avoir restauré la place de Moscou sur la scène internationale, semble déterminé à garder les rênes du pouvoir avec toujours plus de fermeté.
Directeur des services secrets russes (FSB), puis chef du gouvernement avant d’être élu président de la Russie en 2008, Vladimir Poutine s’est construit en vingt ans de pouvoir une réputation d’homme à poigne. Dès son élection à la présidence, il s’efforce de moderniser le pays. Réélu chef d’État en 2018, après avoir laissé sa place le temps d’un mandat à Dmitri Medvedev.
Par Tinno BANG MBANG
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