L’échange de 53 militaires éthiopiens contre sept civils et deux soldats soudanais a été parrainé par la Croix-Rouge et constitue un nouveau pas vers la résolution du conflit frontalier qui a éclaté en 2020.
Khartoum et Addis-Abeba se rapprochent d’une réconciliation dans le conflit frontalier d’Al-Fashaga – une région de terres très fertiles et riches en réserves pétrolières située dans le nord-est du Soudan, et légalement sous le contrôle de Khartoum, bien qu’en pratique habitée par des Amharas de nationalité éthiopienne. L’échange de 62 prisonniers entre les forces armées soudanaises et leur homologue éthiopienne au col d’Al Qalabat – près de la ligne séparant les deux pays – l’a clairement montré.
Le communiqué de presse publié lundi par le Soudan à l’issue de l’opération donne des détails sur l’échange : les parties, réunies à Matamah sous les auspices de la Croix-Rouge internationale, ont remis dimanche les 62 prisonniers – 53 soldats et Éthiopiens et neuf Soudanais, dont sept civils et deux membres de la sécurité militaire – dans une atmosphère de « coopération et de coordination positives entre les deux parties ».
Alors que les autorités soudanaises ont annoncé l’échange – et même le chef de la division des renseignements militaires de la deuxième division d’infanterie, le colonel Suileiman Abu Halima, et le porte-parole des forces armées, le lieutenant-colonel Nabil Abdullah, ont déclaré que cette mesure démontrait les intentions des forces armées soudanaises de coopérer avec les protocoles internationaux et de sauvegarder les droits de l’homme – l’Éthiopie a tardé à les avertir. Addis-Abeba n’a rendu aucune information publique avant midi (15h00 dans le pays africain).
Les 62 prisonniers échangés ont été arrêtés lors des affrontements entre l’Éthiopie et le Soudan qui ont éclaté en 2020 pour le contrôle de la région d’Al-Fashaga. Le territoire – qui avait déjà été officiellement reconnu comme faisant partie du Soudan par les deux parties en 2008 – est redevenu une pomme de discorde lorsque le nouveau gouvernement éthiopien (installé en 2018) a constaté que le plus grand groupe ethnique d’Al-Fashaga, les Amharas, n’avait pas été consulté par le gouvernement du Front populaire de libération du Tigré lors de la rédaction de l’accord de 2008.
Une situation qui, en 2020, a préparé le terrain de sorte que lorsque l’Éthiopien Abiy Ahmed Ali, lauréat du prix Nobel de la paix 2019, a ordonné le lancement d’une offensive contre le Tigré – limitrophe de la région d’Al-Fashaga – Khartoum en a profité pour déployer ses troupes dans la région qui – sur le papier – lui appartient. La confrontation directe entre les deux camps a commencé.
Depuis lors et jusqu’à aujourd’hui, Khartoum a soutenu que les agriculteurs éthiopiens de la région cultivaient sur son territoire sous la protection des milices d’Addis-Abeba, tandis qu’Addis-Abeba a accusé son homologue d’expulser les agriculteurs amharas et de mener des « attaques organisées » du côté éthiopien de la frontière. Des dizaines de soldats des deux côtés ont perdu la vie dans les combats.
Aujourd’hui, les positions de Khartoum et d’Addis-Abeba – déjà en désaccord sur des questions internationales essentielles telles que la construction du barrage de la Grande Renaissance éthiopienne, qui suscite des inquiétudes quant à l’accès à l’eau du Nil dans des pays comme l’Égypte et le Soudan – restent en désaccord sur le conflit d’Al-Fashaga.
Le Soudan affirme qu’il n’y a pas de litige frontalier, que le territoire lui appartient en vertu de l’accord de 1902 signé avec la puissance coloniale de l’époque, la Grande-Bretagne. L’Éthiopie, quant à elle, préconise une solution amiable au conflit qui tienne compte de la situation des habitants amhara d’Al-Fashaga.
RSA Par Nerea Belmonte
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