Cette figure de l’opposition – qui rejette les résultats officiels et la victoire proclamée de Paul Biya à l’élection présidentielle – a réussi à quitter son domicile de Garoua il y a quelques jours, en direction du Nigeria.
Sa maison à Garoua, capitale régionale du nord, était étroitement surveillée par les forces de sécurité camerounaises, et son quartier général à Yaoundé l’était également. Pourtant, Issa Tchiroma Bakary est parvenu à quitter le pays trois semaines après l’élection présidentielle qu’il affirme avoir remportée, bien que le Conseil constitutionnel ait proclamé le président sortant, Paul Biya, vainqueur.
L’opposant Issa Tchiroma Bakary se retranche au Nigeria
Une évasion spectaculaire secoue la classe politique camerounaise ce mois de novembre 2025. L’ancien ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary, a réussi à franchir clandestinement la frontière nigériane en empruntant le fleuve Bénoué, malgré une surveillance renforcée de son domicile à Garoua. « On pensait qu’il était cerné, mais il nous a tous surpris », confie un proche du pouvoir sous couvert d’anonymat. Comment cet opposant déclaré vainqueur par ses partisans a-t-il pu déjouer les forces de sécurité camerounaises ?
Une fuite minutieusement préparée par le fleuve Bénoué
Les faits remontent à trois semaines après l’élection présidentielle controversée. Alors que le Conseil constitutionnel proclamait la victoire de Paul Biya, Issa Tchiroma Bakary préparait discrètement son départ. L’homme politique, qui revendique toujours sa victoire électorale, a exploité la navigabilité saisonnière du fleuve Bénoué pour s’échapper vers l’ouest de Garoua.
Cette voie fluviale, reliant la capitale du Nord à Yola au Nigeria, représente un angle mort dans le dispositif sécuritaire camerounais. « Les forces de l’ordre concentrent leurs efforts sur les routes terrestres, le fleuve c’est autre chose », explique un habitant de Garoua qui préfère garder l’anonymat.
L’ancien ministre entretient depuis des années d’excellentes relations avec les notables de l’Adamawa nigérian. Ces connexions lui ont permis de préparer ce qu’on appelle maintenant dans les couloirs du pouvoir à Yaoundé « une solution de repli bien calculée ». Son épouse, restée à Garoua, maintient les apparences pendant que lui coordonne depuis le Nigeria l’opération « villes mortes » destinée à paralyser l’économie camerounaise.
Un exode politique sans précédent touche l’opposition
Le départ de Tchiroma n’est pas isolé. Une vague de répression frappe actuellement les contestataires des résultats électoraux. L’avocate Michelle Ndoki, figure de proue de l’initiative citoyenne de collecte des procès-verbaux, a également quitté précipitamment le territoire. Felix Agbor Balla, activiste renommé des droits humains, a lui aussi pris le chemin de l’exil.
À Yaoundé, le gouvernement semble divisé sur la stratégie à adopter. Paul Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale, plaide pour une interpellation immédiate. D’autres ministres privilégient une approche plus subtile : « Tchiroma au Nigeria, même à la frontière, c’est un moindre mal. Son influence restera circonscrite », confie une source gouvernementale.
L’extradition : une épée de Damoclès juridiquement floue
La menace d’une demande d’extradition plane néanmoins. Le précédent de 2018, où Abuja avait remis des leaders séparatistes ambazoniens à Yaoundé, reste dans toutes les mémoires. Cette procédure, jugée illégale par la justice nigériane par la suite, complique la donne.
« Même sans accord formel d’extradition, Abuja peut arrêter Tchiroma pour une infraction commise sur son sol, puis négocier avec Yaoundé. C’est plus politique que juridique », analyse un diplomate basé dans la capitale camerounaise. La relation entre Paul Biya et son homologue Bola Tinubu sera déterminante.
Pour l’instant, aucune demande officielle n’a été émise. Les services de renseignement nigérians surveillent étroitement l’opposant camerounais qui, conscient de sa position précaire, évite tout débordement susceptible de heurter ses hôtes.
Le Cameroun fait face à une crise politique sans précédent avec la fuite de plusieurs opposants majeurs.
RSA Par Christiane Tamoura Engo



















































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