Abdelmadjid Tebboune, ex-premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika. Il aura été le premier ministre à la longévité la plus courte de l’histoire du pays : deux mois et vingt-et-un jours. Le limogeage de ce fidèle d’Abdelaziz Bouteflika qui suivait de manière quasi quotidienne la réalisation de la très controversée grande mosquée d’Alger (confiée à une entreprise chinoise) est l’œuvre de Saïd Bouteflika, le frère du président.
Ce dernier était devenu un régent de fait depuis 2013 et l’accident vasculaire cérébral du chef de l’Etat, pratiquement inapte à exercer ses fonctions. L’exaspération des Algériens face à la situation humiliante de devoir subir un président impotent était aggravée est né le 17 novembre 1945 à Méchria (Algérie). Haut fonctionnaire de carrière, membre du Front de libération nationale, il est Premier ministre du 25 mai 2017 au 15 août 2017, ce qui fait de lui le chef de gouvernement étant resté le moins longtemps à la tête de son pays.
Candidat indépendant tout en siégeant au comité central du FLN, qui ne le soutient pas officiellement, il remporte au premier tour l’élection présidentielle de 2019. La campagne de ce scrutin est marquée par des manifestations massives (« Hirak ») et par une abstention record.
Tebboune est issu d’une famille originaire de la commune de Boussemghoun, actuellement dans la wilaya d’El-Bayadh, située dans la région des Haute Plaines steppiques du Sud-Ouest algérien. Son père est un cheikh membre de l’Association des oulémas musulmans algériens et également un militaire. Sa mère est quant à elle une paysanne.
En octobre 2019, s’ouvre le procès de son fils Khaled, en prison depuis le 20 juin 2018, dans le cadre de l’affaire de la saisie, dans le port d’Oran, de 701 kg de cocaïne3.
Formation
Il est diplômé de l’École nationale d’administration en 1969 (2e promotion, « Larbi Ben M’Hidi », section économique et financière).
Carrière professionnelle
Abdelmadjid Tebboune commence sa carrière en 1969 comme administrateur stagiaire, puis administrateur en 1972 dans la wilaya de la Saoura.
Il est successivement secrétaire général de la wilaya de Djelfa (1975-1976), de la wilaya d’Adrar (1977-1979), de la wilaya de Batna (1979-1982) et de la wilaya de M’Sila (1982-1983).
Par la suite, il est wali d’Adrar (1983-1984), de Tiaret (1984-1989) et de Tizi Ouzou (1989-1991).
Parcours politique
Ministre
En juin 1991, Abdelmadjid Tebboune devient ministre délégué chargé des Collectivités locales auprès du ministre de l’Intérieur, dans le gouvernement Ghozali I. Il quitte le gouvernement en 1992.
Il est rappelé par le président Abdelaziz Bouteflika en 1999 au poste du ministre de la Communication et de la Culture dans le gouvernement Benbitour, portefeuille qu’il n’occupera que 6 mois, avant qu’il soit rappelé une 2e fois au poste de ministre délégué chargé des Collectivités locales pour le remaniement des walis.
En 2001, le président le nomme au poste de ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme au sein du gouvernement Benflis II, dernier poste occupé jusqu’en 2002.
Il représente le président Abdelaziz Bouteflika dans plusieurs missions à l’étranger (en Iran, en Syrie) après son départ du gouvernement. À cette époque, il est cité dans l’affaire Khalifa.
Le 3 septembre 2012, il est nommé ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme dans le Gouvernement Sellal I. Il est ensuite nommé ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville dans les gouvernements Sellal II, Sellal III, et Sellal IV.
Le 19 janvier 2017, après la maladie puis la mort de Bakhti Belaïb, il est nommé ministre du Commerce à titre intérimaire.
Premier ministre
Le 24 mai 2017, considéré comme un proche du chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, il est nommé Premier ministre, succédant à Abdelmalek Sellal, qui était à la tête du gouvernement depuis 201220. Le gouvernement est formé le 25 mai.
Abdelmadjid Tebboune est remplacé par l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia le 15 août 2017. Sa volonté de restreindre les importations, de lutter contre la corruption, en mettant en place une inspection générale au sein de la primature et en chargeant ses ministres de « faire le point au sujet des marchés publics » passés par l’ancien gouvernement, et, selon la présidence, son « harcèlement contre les hommes d’affaires » sont évoqués pour expliquer son limogeage.
En juillet, le gouvernement avait ainsi adressé une série de mises en demeure à plusieurs grandes entreprises algériennes ou étrangères adjudicataires de gros marchés publics d’infrastructure, menaçant de résilier les contrats pour les chantiers en retard. Parmi ces entreprises figurait notamment ETRHB, une entreprise des travaux routiers, hydrauliques et bâtiments, propriété d’Ali Haddad, chef du Forum des chefs d’entreprises (FCE), organisation patronale, et proche de Saïd Bouteflika, frère du chef de l’État. Il est ensuite assigné à résidence jusqu’en 2019.
Ces mesures lui valent néanmoins de bénéficier d’une popularité auprès de l’opinion publique. Il est alors cité comme possible successeur de Bouteflika.
Élection présidentielle de 2019
Le 26 septembre 2019, il annonce sa candidature à l’élection présidentielle de décembre, repoussée pour la deuxième fois dans le cadre des manifestants du Hirak, qui a conduit à la démission d’Abdelaziz Bouteflika.
Se présentant comme le « candidat du peuple », Abdelmadjid Tebboune affirme que les revendications des protestataires ne peuvent être satisfaites « sans un président élu et légitime ». Il promet une réforme de la Constitution et de la loi électorale, de même que l’instauration de la « démocratie véritable » au niveau local et national. Il souhaite la récupération par l’État des prêts contractés par des entreprises et jamais remboursés aux banques étatiques. Candidat indépendant, il reste cependant membre du comité central du FLN.
Contesté par les manifestants, il est accusé par ses détracteurs d’être le « candidat de l’armée » et d’être mêlé à l’affaire Khalifa, dans laquelle il est cité ; il se dit favorable à la réouverture du dossier. En novembre 2019, il fait face à la démission de son directeur de campagne et de la révélation par le journal Ennahar, réputé proche du pouvoir, de ses liens avec l’homme d’affaires Omar Aliat, actuellement en prison. À l’approche du scrutin, en l’absence d’enquêtes d’opinion, les médias indiquent qu’il a perdu son statut de favori, Azzedine Mihoubi ayant reçu le soutien de nombreux proches du régime.
Le 12 décembre, après une campagne perturbée par des manifestations importantes jusqu’au jour même de l’élection, Abdelmadjid Tebboune est élu par 58,1 % des suffrages exprimés au premier tour, avec une abstention record (60,1 % des inscrits). Le jour même, conspué par les partisans du Hirak, il est qualifié de « président cocaïne » en référence à l’affaire mêlant son fils. Lors de sa première conférence de presse après son élection, Abdelmadjid Tebboune déclare tendre la main au Hirak et prône le dialogue.
Président de la République
Abdelmadjid Tebboune devient président de la République algérienne démocratique et populaire et prête serment le 19 décembre 2019. Le professeur Abderrahmane Mebtoul estime qu’il a « une lourde responsabilité de rétablir la confiance brisée entre l’État et les citoyens ». Le sociologue Nacer Djabi indique qu’il démarre « avec un grand handicap de légitimité » et que « même si le scrutin n’est pas falsifié, les Algériens n’ont plus confiance ».
À l’issue de sa prestation de serment, le nouveau président salue le Hirak et déclare que « la grande réussite est le fruit du mouvement populaire initié par notre peuple qui a refusé, grâce à sa conscience, l’effondrement de l’État et de ses institutions », renouvelle son appel au dialogue et promet de réaliser ses revendications dans le cadre « dans le cadre d’un consensus politique et les lois de la République ». Il demande à être dispensé du prédicat « excellence » afin de rompre avec l’usage exacerbé de cette formule durant les mandats d’Abdelaziz Bouteflika, terme devenu impopulaire et motif de contestation. Pendant la cérémonie, il décore de la médaille de l’ordre du Mérite national, au grade « SADR », Abdelkader Bensalah et Ahmed Gaïd Salah.
Par Regardsurlafrique
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