Les Etats-Unis imposent un embargo sur le pétrole russe. Sous pression du Congrès américain, le président Joe Biden a annoncé le 8 Mars un embargo sur le pétrole russe, son quatrième fournisseur, en représailles à l’invasion de Moscou en Ukraine. Bien plus dépendante de l’or noir de Moscou que l’Oncle Sam, l’Union européenne ne devrait pas suivre la décision des Etats-Unis. Quelques minutes après l’annonce par la presse américaine, les cours du pétrole se sont envolés de plus de 7%, tutoyant les plus hauts historiques. Dans la foulée, Kwasi Kwarteng, la ministre britannique des Entreprises et de l’énergie a annoncé que le Royaume-Uni arrêterait d’ici à fin 2022 les importations de brut et produits pétroliers russes.
La menace pesait depuis ce weekend et faisait trembler les marchés et les économies mondiales, et notamment l’Union européenne.
L’annonce est brutale et va impacter fortement et durablement les cours du pétrole, qui flambent déjà depuis plusieurs semaines. Celui du baril de Brent de la mer du Nord a frôlé dimanche les 140 dollars vers 23h00 GMT, proche de son record absolu de juillet 2008 où il avait tutoyé les 150 dollars. Quelques minutes après l’annonce de ce mardi, le cours du Brent de la mer du Nord remontait à 132,20 dollars en Europe (+7%) tandis que le brut américain WTI grimpait de 6,20% à 128.38 dollars.
Le chef de l’Etat américain, Joe Biden, a annoncé mardi avoir ordonné un embargo sur les importations américaines de pétrole et de gaz russes, afin d’alourdir les sanctions imposées à la Russie et « porter un nouveau coup puissant à Poutine ». Cette décision a été prise « en coordination étroite » avec les alliés des Etats-Unis, a-t-il précisé. « Nous ne contribuerons pas à subventionner la guerre de Poutine. »
Initialement réticent à l’idée d’un embargo, qui risque d’accélérer encore l’inflation aux Etats-Unis, Joe Biden a été mis sous pression par le Congrès, où un consensus avait été trouvé lundi en vue de soumettre au vote une proposition de loi en ce sens.
Dans la foulée, Kwasi Kwarteng, la ministre britannique des Entreprises et de l’énergie a annoncé que le Royaume-Uni arrêterait d’ici à fin 2022 les importations de brut et produits pétroliers russes.
Les conséquences économiques ne sont pas encore connues, les prix vont encore grimper ce jour, mais le vice-Premier ministre russe, chargé de l’Énergie, Alexandre Novak, mettait en garde dimanche contre cette éventuelle mesure, qui pourrait, selon lui, pousser le baril « à plus de 300 dollars« .
Washington négocie avec de nombreux fournisseurs, même le Venezuela
Les Etats-Unis pourront se tourner vers le Canada, qui pourrait augmenter ses exportations vers son voisin américain, comme l’a déjà proposé, samedi, dans un tweet, la ministre de la province canadienne d’Alberta, Sonya Savage. Le Canada est la première source de pétrole étranger pour les Etats-Unis (61% des volumes).
C’est le New York Times qui l’a révélé dimanche, une délégation d’officiels de haut rang de l’administration Biden s’est rendue à Caracas (Venezuela) pour négocier la levée des sanctions économiques imposées à la république bolivarienne, notamment les restrictions imposées par l’administration Trump en 2019 sur les exportations pétrolières.
Mais Washington a surtout cassé un tabou en ce début de semaine, en relançant des discussions avec son plus grand ennemi du continent : le Venezuela. Une délégation américaine a rencontré lundi soir le président Nicolas Maduro. L’objectif est notamment de lever l’embargo sur le pétrole de la république bolivarienne, sous sanctions américaines depuis des années.
Le président vénézuélien, Nicolàs Maduro, a confirmé la réunion lundi soir, la qualifiant de « respectueuse, cordiale et diplomatique », sans entrer dans le détail des questions abordées.
« Il m’a paru important de pouvoir discuter en face à face des questions d’un grand intérêt pour le Venezuela », a-t-il poursuivi. « Je réaffirme, comme je l’ai dit à la délégation, toute notre volonté, par la diplomatie, le respect, et le maximum de ce qu’il y a de mieux dans le monde, de pouvoir faire avancer un agenda qui permette le bien-être et la paix des peuples de notre hémisphère, de notre région ».
La Maison Blanche a confirmé la rencontre lundi, soulignant que les discussions avaient porté notamment sur « la sécurité énergétique » américaine alors que le Venezuela exportait presque toute sa production vers les Etats-Unis avant la rupture avec Washington.
Le pays sud-américain est toutefois très loin de pouvoir compenser les 10,5 mbj de brut produits en 2021 par la Russie, soit 14% de la production mondiale. La production du Venezuela est selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE) de 600.000 barils par jour en 2021, soit à peine le quart de ce que le pays produisait à la fin des années 1990. Selon des experts cités par le Wall Street Journal, cette production pourrait monter à 1,2 mbj en 8 mois, si les compagnies présentes dans le pays, comme l’américaine Chevron, augmentaient leurs extractions.
Une démarche critiquée
Peu de choses ont filtré de la réunion que Nicolas Maduro a qualifié de « respectueuse, cordiale et diplomatique ». Mais d’après les informations du New York Times, le président vénézuélien serait prêt à augmenter la production de pétrole. En échange, les États-Unis pourraient lever au moins une partie des sanctions sur le pétrole vénézuélien, en vigueur depuis deux ans.
Cette démarche ne fait pas l’unanimité à Washington. Certains élus américains comme le sénateur Marco Rubio estiment que les tentatives d’isoler le président russe ne devraient pas se faire au profit d’autres dirigeants autoritaires. Le premier résultat concret du rapprochement entre les deux pays est sans doute la libération de deux prisonniers américains (sur 10 au total).
En 2019, les deux pays avaient rompu leurs relations diplomatiques après la réélection de Nicolás Maduro, lors d’un scrutin boycotté par l’opposition. Le gouvernement américain ne reconnait pas le président vénézuélien. Mais la crise avec la Russie l’oblige à se rapprocher de celui qui était jusqu’ici considéré par Washington comme un paria.
Enfin, les Etats-Unis espèrent un accord sur le nucléaire iranien, ce qui devrait permettre de rendre disponible des millions de barils sur les marchés mondiaux. L’Iran pourrait rapidement faire grimper sa production de 2,5 mbj à 3,6 mbj au deuxième semestre de cette année, selon les calculs des experts du Oxford Institute for Energy Studies, dans une note d’analyse sur les conséquences de la guerre en Ukraine.
Par Regard Sur l’Afrique
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