La visite de l’émir qatari en Espagne se termine par un investissement d’un million de dollars et la signature de 12 accords bilatéraux.
L’émir du Qatar, Sheikh Tamin bin Hamad Al Thani, a conclu sa visite officielle en Espagne en annonçant un investissement de 4,72 milliards d’euros (5 milliards de dollars) dans le pays ibérique. Cette décision, selon le Président du gouvernement espagnol Pedro Sánchez, démontre la confiance de Doha dans la force de l’économie espagnole. « Il s’agit sans aucun doute d’un grand geste de confiance non seulement dans l’économie espagnole mais aussi dans les entreprises espagnoles », a-t-il souligné.
Le cheikh qatari et le gouvernement espagnol ont également scellé « une union stratégique » par la signature de 12 accords et mémorandums d’entente dans les domaines de l’économie, du commerce, de l’éducation, de la coopération militaire et judiciaire, de la santé, des sciences et de l’innovation. Ce partenariat est susceptible de se poursuivre et de se développer à l’avenir. Comme l’a déclaré à 20minutos Abdalla Al-Hamar, l’ambassadeur du Qatar en Espagne, Doha souhaite « continuer à renforcer les liens ». « Le Qatar considère l’Espagne comme un pays ami et proche, et nous sommes sûrs que notre coopération va s’intensifier au fil des ans », a ajouté Al-Hamar.
En outre, selon EFE, les deux pays se sont également engagés à respecter les droits de l’homme et à interdire le recours à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État. En ce sens, Sánchez et Al Thani ont exprimé leur solidarité avec l’Ukraine face à l’invasion de la Russie.
La famille royale espagnole a chaleureusement accueilli le cheikh Al Thani et son épouse, Sheikha Jawaher bint Hamad bin Suhaim Al Thani, dans le pays, y compris les honneurs militaires. Pour Madrid, cette visite revêt une importance particulière en termes d’énergie. Le Qatar est l’un des pays disposant des plus grandes réserves de gaz au monde et, depuis l’invasion de l’Ukraine, il s’est positionné comme une alternative viable au gaz russe.
Outre les problèmes actuels avec la Russie, la situation de l’Espagne est marquée par l’incertitude quant à l’approvisionnement en gaz de l’Algérie, son principal fournisseur. Depuis que Madrid a changé sa position sur le Sahara occidental, reconnaissant le plan d’autonomie marocain comme la proposition la plus sérieuse et la plus crédible, les relations hispano-algériennes se sont nettement détériorées.
En représailles à ce changement politique, Alger a retiré son ambassadeur de Madrid, qualifiant la décision du gouvernement espagnol de « trahison ». Depuis lors, les inquiétudes concernant l’approvisionnement en gaz sont montées en flèche. L’Algérie a fait monter la tension fin avril en menaçant de révoquer le contrat énergétique si l’Espagne envoie son gaz vers un point « dont la destination n’est pas celle prévue », faisant allusion au Maroc, un pays avec lequel elle a rompu ses relations diplomatiques en août et avec lequel elle a un fort différend politique. Madrid a de nouveau retenu son souffle au début du mois, lorsque la société Enagás a prévenu que l’approvisionnement en gaz algérien avait chuté de 25 %.
Le Qatar : une alternative au gaz algérien et russe ?
Le voyage de l’émir Al Thani à Madrid est un répit pour le pays, qui voit en Doha un nouvel allié énergétique au milieu de la crise avec Alger. L’État du Golfe est actuellement le cinquième fournisseur de gaz de l’Espagne, derrière les États-Unis, l’Algérie, le Nigeria et l’Égypte.
Des analystes cités par Al Arab suggèrent que cette visite pourrait fournir à l’Espagne « une alternative efficace et crédible » à l’heure actuelle. Toutefois, les experts soulignent également que la démarche du Qatar « représente une provocation pour l’Algérie », l’allié régional de Doha. « Les intérêts ne sont généralement pas soumis à des alliances politiques », soulignent-ils.
Le Qatar est le cinquième fournisseur de gaz de l’Espagne, après les États-Unis, l’Algérie, le Nigeria et l’Égypte.
L’Espagne voit également dans ce partenariat l’occasion d’utiliser ses terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL), ce qui lui permettrait de consolider sa position en tant que point de stockage important pour les autres pays du continent qui cherchent à réduire leur dépendance vis-à-vis de la Russie. Cependant, l’Espagne ne dispose toujours pas des infrastructures nécessaires pour réexporter du gaz vers l’Europe du Nord à cette fin.
Pour ces raisons, la visite du cheikh Al Thani en Espagne revêt une signification particulière. Madrid a reçu l’émir qatari en pensant à l’énergie, la grande priorité et, en même temps, le grand défi auquel l’Europe est confrontée actuellement. La nation ibérique n’est donc pas la seule à considérer Doha comme un grand allié stratégique dans ce domaine. D’autres États européens comme l’Allemagne et la Pologne renforcent leurs relations avec le pays du Golfe afin d’accroître la coopération énergétique. Varsovie poursuit cet objectif depuis des années par le biais d’accords axés sur le GNL, tandis que Berlin a commencé à se rapprocher du Qatar depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Toutefois, depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, les analystes se demandent si le gaz qatari peut remplacer le gaz russe. Même les autorités qataries ont reconnu qu’« aucun pays ne peut remplacer » le volume offert par la Russie.
La plupart des fournitures de gaz sont envoyées vers des pays asiatiques où Doha a déjà conclu des accords qu’elle ne peut pas suspendre. Ce point concerne non seulement l’Europe dans ses efforts pour réduire sa dépendance au gaz russe, mais aussi l’Espagne dans sa crise avec l’Algérie.
Le Japon, la Corée du Sud et l’Inde représentent 75 % des exportations de gaz du Qatar, selon les chiffres de 2020 de l’autorité nationale des statistiques du Qatar (PSA). Par conséquent, comme plusieurs experts l’ont signalé à Al-Arabiya News, les volumes de GNL que certaines entreprises qataries pourraient envoyer en Europe seraient trop faibles pour faire une grande différence.
RSA Par Margarita Arredondas
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