Constituée de personnalités toutes acquises au président Félix Tshisekedi, la nouvelle équipe gouvernementale a été dévoilée lundi en République démocratique du Congo. Elle est nommée quatre mois après la rupture de la coalition du président Tshisekedi avec son prédécesseur, Joseph Kabila.
Un nouveau gouvernement constitué de personnalités toutes acquises au président Félix Tshisekedi a été dévoilé lundi 12 avril en République démocratique du Congo. C’est le couronnement de la bataille d’émancipation du président Tshisekedi contre son prédécesseur, Joseph Kabila, après l’éclatement en octobre de la coalition qui les liait depuis janvier 2019.
« La taille du gouvernement a été réduite, la participation de la femme et de la jeunesse a été prise en compte. Les principes de représentativité et d’inclusivité ont été respectés », a déclaré, lors de l’annonce de la nomination de son gouvernement, Jean-Michel Sama Lukonde, le Premier ministre nommé le 15 février dernier.
Le précédent cabinet, un gouvernement de coalition formé en août 2019, était dirigé par Sylvestre Ilunga Ilunkamba (pro-Kabila) et comportait 66 membres, en plus du Premier ministre. Les partisans de Joseph Kabila y étaient majoritaires (43 pro-Kabila et 23 pro-Tshisekedi) et occupaient des postes clés. L’équipe gouvernementale était composée à 83 % d’hommes et à 17 % de femmes.
Le nouveau gouvernement, baptisé gouvernement de « l’union sacrée de la nation »
Aux Mines, à la Justice, au Portefeuille… Félix Tshisekedi a confié des maroquins importants à des femmes. L’une d’elle – Eve Bazaiba, bras droit de Jean-Pierre Bemba – devient même vice-Première ministre. Portrait de quelques unes de ces personnalités qui devraient peser.
Le nouveau gouvernement avec des femmes à des postes stratégique, baptisé gouvernement de « l’union sacrée de la nation », compte, en plus du Premier ministre, 57 membres dont 14 femmes, soit une représentativité féminine de 27 %, d’après l’ordonnance présidentielle lue à la télévision d’État (RTNC) par le porte-parole du président, Kasongo Mwema.
Ève Bazaiba, vice-Premier ministre
Secrétaire générale du Mouvement de libération du Congo (MLC), le parti de Jean-Pierre Bemba, Ève Bazaiba, 55 ans, est une figure de la scène politique congolaise. Elle est l’un des quatre vice-Premiers ministres nommés ce lundi et se voit confier l’Environnement, devenant au passage la troisième personnalité du gouvernement par ordre protocolaire. Elle a rejoint le MLC en 2006. Opposante farouche à Joseph Kabila, elle est depuis 2014 le bras droit de Bemba.
Adèle Kahinda au Portefeuille
Adèle Kahinda est un pilier de l’Alliance des forces démocratiques du Congo (AFDC), le parti de Modeste Bahati Lukwebo. Auparavant membre du FCC, l’AFDC a fait défection dans le courant de l’année 2020. Moins connue qu’Ève Bazaiba, Adèle Kahinda hérite néanmoins d’un maroquin stratégique, celui du Portefeuille. Quand le Front commun pour le Congo (FCC, de Joseph Kabila) tenait la majorité parlementaire, avant que le rapport de force ne bascule à Kinshasa, c’est le ministère du Portefeuille qui, tenu par le FCC et engagé dans un bras de fer avec Félix Tshisekedi, bloquait les ordonnances de nomination à la tête des grandes entreprises publiques, telles que la Gécamines ou la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC).
Rose Mutombo Kiese à la Justice
Présentée par le Premier ministre comme membre de la société civile, elle a l’avantage de bien connaître Félix Tshisekedi ainsi que son ancien directeur de cabinet, Vital Kamerhe (qui a certes été condamné à vingt ans de prison, mais dont le parti conserve quatre ministères dans le nouveau gouvernement). Elle succède à Célestin Tunda Ya Kasende (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie, PPRD) qui avait démissionné en juillet dernier et n’avait pas été remplacé. Rose Mutombo Kiese, qui a elle aussi rang de ministre d’État, était auparavant avocate générale près le Conseil d’État.
Antoinette N’Samba Kalambayi au ministère des Mines
Le ministère des Mines, qui était également contrôlé par la coalition de Kabila, est confié à Antoinette N’Samba Kalambayi. Cette personnalité elle aussi issue de la société civile est surtout connue en RDC pour avoir publié en 2016 un ouvrage questionnant l’indépendance de la commission électorale (La Commission électorale nationale indépendante de la RD Congo.
À la tête d’un secteur stratégique en RDC, Antoinette N’samba va devoir relever de très nombreux défis : lister les permis de recherche qui, contournant la législation, ne sont jamais transformés en permis d’exploitation ; s’assurer qu’ils soient au besoin réattribués ; veiller au rapatriement de la partie en devises des exportations, ainsi que le prévoit le code minier révisé ; procéder à la titrisation des gisements afin de rechercher des financements sur les marchés financiers ; pousser les opérateurs miniers à signer un cahier des charges avec les communautés affectées par l’exploitation minière…Une tâche est immense.
Aminata Namasia, vice-ministre de l’Enseignement
C’est la benjamine de ce nouveau gouvernement : Aminata Namasia, 28 ans, devient vice-ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique. Pour cette députée, ce poste est une forme de récompense puisque, en tant que questeur du bureau d’âge de l’Assemblée nationale, elle a contribué à faire chuter Jeanine Mabunda (FCC) du perchoir en décembre dernier.
Aminata Namasia va devoir concrétiser l’une des promesses phares du président Tshisekedi, à savoir la gratuité de l’enseignement de base.
Les dix autres femmes nommées sont…Elles sont également nommés à la tête de ministères
- Anne-Marie Karume Bakaneme (Relations avec le Parlement ),
- Gisèle Ndaya Luseba (Genre, Famille et Enfants),
- Antoinette Kipulu (Formation professionnelle),
- Catherine Katumbu Furaha (Culture)
- Ndusi Ntembe (Emploi, Travail et Prévoyance sociale).
- Séraphine Kilubu Kutuna est pour sa part nommée vice-ministre de la Défense,
- Elysée Bokumuana Maposo vice-ministre du Budget,
- Véronique Kilumba Nkulu vice-ministre de la Santé
- Irène Esambo, ministre déléguée aux Affaires sociales et aux actions humanitaires.
- Nana Manuanina Kihumba devient ministre près le président de la République.
Ce nouveau gouvernement clôt définitivement l’acte I du quinquennat Tshisekedi (janvier 2019-décembre 2020), marqué par l’échec de la coalition avec Joseph Kabila.
Tous les proches de l’ancien président Kabila ont alors été écartés successivement de la tête des institutions politiques et judiciaires du pays. Une bonne partie de la classe politique a quitté Joseph Kabila pour faire allégeance au président Tshisekedi.
Félix Thisekedi a été proclamé vainqueur de la présidentielle controversée de décembre 2018. Investi le 24 janvier 2019, l’ancien opposant a dirigé le pays jusqu’en novembre dernier en coalition avec le camp de son prédécesseur Kabila, qui avait gardé la majorité à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Le 6 décembre, le chef de l’État a mis fin à cette coalition et s’est lancé dans une conquête de tous les leviers du pouvoir sur fond de menace de dissolution du Parlement. Félix Tshisekedi et ses partisans ont finalement réussi, à force de débauchages, à renverser la majorité de Joseph Kabila dans les deux chambres.
Par Tinno BANG MBANG
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