La Chine accueille jusqu’à mercredi les représentants de quelque 130 pays pour le forum des «Nouvelles routes de la soie» (appelé officiellement «La ceinture et la route»), un événement diplomatique majeur
- Invité de premier plan, Vladimir Poutine
Le président russe Vladimir Poutine est arrivé mardi à Pékin, où il doit rencontrer son homologue et allié Xi Jinping, à l’occasion d’un grand sommet multilatéral.
La capitale chinoise accueille les 17 et 18 octobre des représentants de 130 pays, dont le dirigeant russe, à l’occasion du forum des Nouvelles routes de la soie qui marquera le 10e anniversaire du lancement de ce vaste projet d’infrastructures.
Ce programme, dont l’appellation officielle est « La Ceinture et la Route », vise à améliorer les liaisons commerciales entre l’Asie, l’Europe, l’Afrique et même au-delà par la construction de ports, de voies ferrées, d’aéroports ou de parcs industriels.
- Lourdement sanctionnée par les Occidentaux en raison de son offensive contre l’Ukraine, la Russie cherche à resserrer ses liens, déjà très étroits, avec la Chine, laquelle semble avoir pris l’ascendant dans leurs relations bilatérales
Le président chinois Xi Jinping a salué mercredi la confiance « croissante » entre Pékin et Moscou, lors d’un entretien avec son homologue russe Vladimir Poutine dans la capitale chinoise.
« La confiance politique mutuelle entre les deux pays est en croissance constante », a-t-il déclaré à son allié selon l’agence officielle Chine nouvelle, au moment où les deux hommes affichent leur unité face à l’Occident.
Le dirigeant a appelé les deux pays à « sauvegarder l’équité internationale » et « la justice », selon la même source, soulignant « la coordination stratégique proche et efficace » entre la Chine et la Russie.
Les deux hommes se sont rencontrés en marge du forum des Nouvelles routes de la soie à Pékin.
Lourdement sanctionnée par les Occidentaux en raison de son offensive contre l’Ukraine, la Russie cherche à resserrer ses liens, déjà très étroits, avec la Chine, laquelle semble avoir pris l’ascendant dans leurs relations bilatérales.
Vladimir Poutine est l’invité de marque du forum qui se tient jusqu’à mercredi, avec la présence de représentants de quelque 130 pays, principalement du Sud.
Il s’agit de son premier déplacement dans une grande puissance mondiale depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, qui a isolé la Russie sur la scène internationale.
«Confrontation idéologique»
Mercredi dans un discours à l’ouverture du forum, Xi Jinping a dénoncé la « coercition économique » et « la confrontation de blocs ».
« Nous nous opposons aux sanctions unilatérales, à la coercition économique, au découplage et à la réduction des liens » économiques, a-t-il déclaré.
Dans un contexte de tensions avec Pékin, certains responsables politiques en Europe et aux Etats-Unis prônent depuis plusieurs mois un « découplage » avec la Chine, c’est-à-dire de couper tout lien économique avec le géant asiatique, ou du moins de limiter leur dépendance.
Pékin ne va pas s’engager dans « une confrontation idéologique, des jeux géopolitiques ou une confrontation de blocs », a assuré Xi Jinping mercredi.
« Voir le développement des autres comme une menace et l’interdépendance économique comme un risque ne va pas améliorer la vie de chacun, ni le faire se développer plus vite », a-t- il ajouté.
- XI JINPING ET VLADIMIR POUTINE, UNE AMITIÉ DE DIX ANS
- Il y a dix ans, ils trinquaient avec de la vodka à la naissance de leur amitié. Mercredi, les dirigeants chinois Xi Jinping et russe Vladimir Poutine se rencontrent à Pékin pour approfondir le partenariat « sans limites » entre leurs deux pays.
- Les deux présidents ont une relation personnelle forte, M. Xi qualifiant son homologue de « meilleur ami », tandis que M. Poutine évoque un « partenaire fiable ».
- Alors que leurs liens sont de plus en plus tendus avec les pays occidentaux, cela a semblé les rapprocher encore, en témoigne le refus de Pékin de condamner l’invasion russe en Ukraine.
- Arrivé la veille dans la capitale chinoise, Vladimir Poutine doit y rencontrer mercredi Xi Jinping selon le Kremlin.
- Ce rare déplacement à l’étranger lui permet de rendre hommage au projet phare du dirigeant chinois, les Nouvelles routes de la soie, dont se tient le 3e forum cette semaine. Mais aussi de montrer qu’il n’est pas seul.
- « La présence de la délégation russe à Pékin est importante pour Moscou » car, elle « va légitimer la Russie sur la scène internationale en créant une image positive de Poutine » et montrer qu’il n’est « pas complètement isolé » malgré la guerre en Ukraine, estime Alicja Bachulska, experte au Conseil européen des relations étrangères.
- L’amitié entre les deux dirigeants s’est forgée autour d’un gâteau et de verres de vodka, à l’occasion de l’anniversaire du président russe lors d’un sommet en Indonésie en 2013.
- Puis en 2018, Xi Jinping a fait traverser la Chine à Vladimir Poutine en TGV. Les deux hommes avaient préparé des petits pains à la vapeur.
- Quelques mois plus tard, quand M. Xi est allé en Russie, tous deux avaient cuisiné ensemble des crêpes au caviar.
- En 2019, Poutine avait organisé une fête d’anniversaire surprise pour le président chinois,
- avec champagne et glaces lors d’un sommet au Tadjikistan. – « Neutralité pro-Russie » –
- Dans leurs parcours, on trouve beaucoup de similarités: tous deux sont nés au début des années 1950, à seulement quelques mois d’écart. Xi Jinping provient d’une famille de révolutionnaires communistes. Vladimir Poutine, lui, est un ancien agent des renseignements soviétiques.
- Les deux sont hantés par l’effondrement de l’URSS, « un désastre géopolitique majeur », selon M. Poutine. Une sévère mise en garde pour le Parti communiste chinois pour Xi Jinping.
- Au pouvoir depuis de nombreuses années, ils disent vouloir raviver la grandeur de leur nation… Tout en muselant l’opposition.
- Se présentant comme un contrepoids au monde occidental et surtout aux Etats-Unis, Pékin et Moscou décrivent leur relation comme un « partenariat global et stratégique » qui est « sans limites ».
- Leur amitié perdure malgré l’invasion russe en Ukraine en février 2022, qui a isolé Moscou et Poutine d’une partie de la communauté internationale.
- Sous pression diplomatique, Pékin a pourtant refusé de condamner cette invasion et se présente comme neutre.
- Pour l’expert Joe Webster, du groupe de réflexion Atlantic Council, il s’agit plutôt d’une « neutralité pro-Russie ».
- Ce qui implique selon lui un soutien diplomatique, économique et d’assistance militaire non- létale de Pékin à Moscou, sur fond d’intensification des échanges commerciaux.
- «Recalibrer » les relations»
- Mais la mutinerie avortée cet été du mercenaire russe Evguéni Prigojine « a choqué Pékin et l’a poussé à recalibrer ses relations avec Moscou ».
- Désormais, « Pékin cherche à dépersonnaliser la relation et à institutionnaliser les liens entre les deux systèmes politiques » afin de « s’assurer de liens étroits avec la Russie, quelle que soit la personne qui y est au pouvoir », souligne Joe Webster.
- Ce changement subtil révèle la nature déséquilibrée de la relation entre Pékin et Moscou, la Russie dépendant de plus en plus de son voisin pour soutenir son économie et ses efforts de guerre.
- Depuis l’invasion de l’Ukraine, elle « se retrouve dans une position de dépendance sans précédent vis-à-vis de la Chine », note Bjorn Alexander Duben, chercheur en relations internationales à l’université chinoise de Jilin.
- « L’engagement économique continu (de la Russie) envers la Chine se transforme progressivement en une relation de dépendance directe », souligne M. Duben. « Cela pose la
- question de savoir si la Russie s’oriente vers une relation de client avec Pékin ».
- Pour les analystes, la visite en Chine de Vladimir Poutine permettra surtout d’obtenir un soutien politique, plutôt que de décrocher de gros contrats.
- « Nous pourrions voir des résultats dans les mois et les années à venir avec la réalisation de projets d’infrastructure, mais je ne m’attends pas à des résultats significatifs cette fois-ci », commente Alexander Gabuev, le directeur du centre de réflexion Carnegie Russia Eurasia Center.
- « C’est la Chine qui a toutes les cartes en main », poursuit-il. « La Russie aimerait désespérément voir un accord annoncé, mais c’est la Chine qui dicte le rythme ».
«Coopération équitable»
Moscou et Pékin « partagent le désir de coopération équitable dans le monde », a déclaré Vladimir Poutine dans un discours juste après celui de Xi Jinping.
Il a salué le « succès » des Nouvelles routes de la soie.
L’ex-Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, présent au forum qu’envoyé spécial du président français, a quitté la salle peu avant le début du discours de M. Poutine, selon des journalistes sur place.
Dans son discours, Xi Jinping a défendu les Nouvelles routes de la soie, vaste projet d’infrastructures porté par Pékin dans une centaine de pays, affirmant qu’elles vont « apporter un nouvel élan à l’économie mondiale ».
« Les Nouvelles routes de la soie visent à renforcer la connectivité en termes de politiques, d’infrastructures, de commerce, de finance et entre les peuples, et à apporter un nouvel élan à l’économie mondiale », a-t-il déclaré.
« Nous pensons fortement que seule la coopération gagnant-gagnant peut permettre de faire des choses et de les faire bien », a ajouté Xi Jinping.
L’ombre de la guerre
L’entretien entre MM. Poutine et Xi survient au moment où la guerre fait rage entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas.
Les pays occidentaux ont majoritairement soutenu Israël depuis le 7 octobre, date à laquelle des combattants du Hamas ont franchi la frontière entre la bande de Gaza et l’Etat hébreu pour massacrer plus de 1.400 personnes – pour la plupart des civils.
Egalement présent à Pékin, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a estimé mercredi que l’attaque du Hamas en Israël « ne (pouvait) justifier la punition collective des Palestiniens » de Gazas.
Il a prôné un « cessez-le-feu humanitaire immédiat » dans le conflit.
Washington a appelé Pékin à user de son « influence » pour apaiser la situation dans la région, où les bombardements de représailles israéliens sur Gaza ont tué plus de 3.000 personnes, en majorité des civils palestiniens, selon les autorités locales.
La Chine avait parrainé en mars le spectaculaire accord de rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran – soutien du Hamas – et l’Arabie saoudite.
Pékin va également envoyer cette semaine dans la région son émissaire pour le Moyen- Orient, Zhai Jun. Selon la télévision d’Etat CCTV, il plaidera en faveur d’un cessez-le-feu et de pourparlers de paix.
La Russie, qui entretient traditionnellement de bonnes relations avec les autorités israéliennes et palestiniennes, a appelé à un « cessez-le-feu immédiat » dans le conflit.
Regard Sur l’Afrique et Arabnews
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