Le président Faustin Archange Touadéra durcit le bras de fer avec la Cour constitutionnelle centrafricaine. Dans deux décrets distincts datés de lundi, il a mis fin aux fonctions de la présidente de la juridiction Danièle Darlan et du juge Trinité Bango Sangafio pour « empêchement définitif », suite à leur mise à la retraite de la fonction publique.
L’annonce a été faite ce mardi 25 octobre à la radio nationale centrafricaine. Le premier décret annule l’élection de Danièle Darlan et Trinité Bango Sangafio en tant que membres de la Cour constitutionnelle. Le second décret concerne quant à lui exclusivement Danièle Darlan, la présidente de la juridiction. Il annule spécifiquement son élection à la présidence de la Cour constitutionnelle. Pas d’autre changement en ce qui concerne les autres juges.
Les deux personnalités font l’objet d’un « empêchement définitif » après avoir été mises à la retraite de la fonction publique.
Dans la foulée, l’université de Bangui, où Danièle Darlan était professeure de droit, a annoncé son remplacement prochain. Augustin Jérémie Doui-Wawaye, le doyen de la faculté de sciences juridique et politique de l’université de Bangui a indiqué dans un communiqué avoir convoqué une assemblée extraordinaire vendredi matin. L’ordre du jour portera sur le « remplacement de la représentante des enseignants du supérieur à la Cour constitutionnelle ». Autrement dit, Danièle Darlan, qui n’est pas nommément citée dans le communiqué.
Tout cela est une nouvelle étape dans le bras de fer juridique qui oppose la juridiction au pouvoir centrafricain. Les juges de la Cour constitutionnelle, saisis par l’opposition, doivent très prochainement se prononcer sur la constitutionnalité du processus. La semaine dernière, la Cour constitutionnelle avait elle-même rappelé que ses juges étaient inamovibles.
L’opposition dénonce un « coup d’État constitutionnel »
Du côté de l’opposition, le Kwa Na Kwa de l’ancien président François Bozizé a fait part ce mardi midi de sa « profonde consternation ». Le parti accuse le président Faustin Archange Touadéra de violer une fois de plus la Constitution en mettant fin aux fonctions de Danièle Darlan « pourtant inamovible ». Pour le Kwa Na Kwa, « cet acte » est « d’une gravité sans précédent » et « plonge la République centrafricaine dans une insécurité juridique absolue ».
Le son de cloche est similaire du côté du Bloc républicain pour la défense de la Constitution, plateforme qui rassemble une trentaine de partis politiques et d’organisations de la société civile. « Le régime du président Faustin Archange Touadéra est désormais en dehors de l’ordre constitutionnel », affirme-t-on en son sein. Et il ne s’arrêtera pas là, avertit le porte-parole du B-R-D-C, l’opposant Martin Ziguélé :
« Nous considérons ça comme un coup d’État constitutionnel. C’est-à-dire qu’il veut, à marche forcée, accomplir son dessein qui est de modifier la Constitution. Et donc, (concernant) tous ceux ou toutes celles qui résistent à sa démarche, il est prêt à violer la loi, à violer la Constitution, pour les écarter tout simplement. »
Les soutiens du président applaudissent
La majorité présidentielle salut, de son côté, des décrets qu’elle juge logiques. Et s’ils ouvrent la voie à un référendum sur la modification de la Constitution, Mathurin Dimbélé Nakoué s’en félicite. Il est le rapporteur général et porte-parole de Beoko, plateforme qui regroupe les partis proches du pouvoir :
« Est-ce qu’il est interdit à un président de la République, à un chef de l’État, de se référer à son peuple lorsqu’un problème se pose ? Non. Le peuple réclame une nouvelle Constitution et le président a l’obligation de répondre à ce peuple. Et je voudrais vous dire, ce ne sont pas seulement les partisans du président. C’est tout le peuple centrafricain ! »
Samedi 22 octobre, les militants pro-pouvoir ont manifesté à Bangui. Ils demandaient au chef de l’État d’abroger le décret entérinant la désignation des membres de la Cour constitutionnelle. Ils réclamaient aussi l’organisation d’un référendum dans un délai de 30 jours. Faustin Archange Touadéra a alors fait savoir à ses partisans qu’il les avait « entendus ».
RSA avec RFI
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