Kinshasa accuse depuis plusieurs années Kigali de piller ses ressources naturelles en instrumentalisant le groupe rebelle M23 qui contrôle de larges pans de la province minière du Nord-Kivu.
La République démocratique du Congo (RDC) a demandé, le mercredi 8 mai 2024, un embargo international sur les exportations de minerais depuis le Rwanda voisin, qu’elle accuse d’utiliser des groupes rebelles armés pour piller ses ressources naturelles.
« Tous les produits miniers en provenance du Rwanda devraient être considérés comme des « minerais de sang », car leur vente alimente le conflit dans l’est de la RDC », a déclaré la ministre congolaise des Mines, Antoinette N’Samba Kalambayi, dans un communiqué.
« Tous les acteurs, y compris les consommateurs finaux de produits miniers, doivent s’engager à respecter une chaîne d’approvisionnement responsable et un embargo doit être décrété à l’encontre du Rwanda. Cette option a l’avantage de freiner le financement des conflits par les minerais, restaurer la confiance des parties prenantes, protéger les intérêts économiques légitimes de l’Etat et atténuer les violations des droits de l’homme par les groupes armés et les armées étrangères », a-t-elle ajouté.
L’appel lancé par la ministre congolaise fait suite à la prise de contrôle, début mai, des plus grandes mines de tantale situées dans l’est de la RDC par le groupe rebelle Mouvement du 23 mars (M23). Kinshasa et les Nations unies affirment que ce groupe rebelle formé par des Tutsis de la RDC est soutenu par le Rwanda qui reçoit en contrepartie des minerais de contrebande.
Dans une enquête publiée en juillet 2022, l’ONG Global Witness a également révélé que 90% des quantités de coltan (principale source du tantale), d’étain et de tungstène, trois minerais plus connus sous l’appellation « minerais 3T », exportés par le Rwanda sont introduits illégalement à partir du voisin congolais.
Kigali a nié à plusieurs reprises tout soutien au M23. En avril dernier, la porte-parole du gouvernement rwandais, Yolande Makolo, a déclaré à Bloomberg que les accusations congolaises de pillage de minerais par le Rwanda relèvent d’une « stratégie de bouc émissaire » du gouvernement congolais pour « dissimuler ses propres échecs en matière de sécurité et de gouvernance ».
Fin avril, la RDC avait accusé le groupe Apple d’utiliser dans ses produits des minerais « exploités illégalement » qui proviendraient « de mines congolaises » au sein desquelles « de nombreux droits humains sont violés ». Selon les avocats mandatés par Kinshasa, ces minerais seraient ensuite « transportés hors de la RDC, et notamment vers le Rwanda où ils seraient blanchis ».
Apple a cependant affirmé n’avoir « trouvé aucune base raisonnable pour conclure que l’une des fonderies ou raffineries de 3TG (étain, tungstène, tantale, or) déterminées comme faisant partie de [sa] chaîne d’approvisionnement au 31 décembre 2023 [avait] directement ou indirectement financé ou bénéficié à des groupes armés en RDC ou dans un pays limitrophe ».
Ces dernières années, les minerais sont devenus un pilier de l’économie formelle du Rwanda, avec des exportations avoisinant un milliard de dollars au cours du dernier exercice fiscal, selon les données publiées par la Banque centrale rwandaise.
RSA avec Ecofin
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