Israël a conclu un contrat « historique » pour la fourniture de gaz naturel à l’Egypte, a annoncé, lundi 19 février, le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou. « Cela va rapporter des milliards dans les coffres de l’Etat », a affirmé dans un communiqué M. Nétanyahou, sans donner d’autres détails.
Selon un communiqué du groupe énergétique israélien Delek, le montant du contrat devrait atteindre 15 milliards de dollars (12 milliards d’euros). L’accord a été conclu avec la compagnie privée égyptienne Dolphinus par un consortium qui comprend Delek et le groupe américain Noble Energy, pour la fourniture de 64 milliards de mètres cubes extraits des champs offshore Leviathan et Tamar en Méditerranée, a indiqué Delek.
A ce stade, a précisé le ministre égyptien, « le gouvernement a approuvé de manière préliminaire l’importation de gaz depuis Israël une fois que trois conditions seront remplies ». Ces conditions, a-t-il précisé, sont l’approbation définitive de cette importation par le gouvernement, l’assurance qu’elle sera bénéfique à l’économie de l’Etat égyptien et la conclusion d’arbitrages qui sont en cours de discussion.
Israël a peu de ressources naturelles, mais d’importants champs gaziers ont été découverts au début des années 2000. En septembre 2016, un contrat estimé à 10 milliards de dollars a été signé pour l’exportation vers la Jordanie de gaz extrait de Leviathan. Les fournitures de gaz en provenance de ce champ doivent débuter en 2019. La Jordanie et l’Egypte sont les deux seuls pays arabes à avoir signé un traité de paix avec Israël.
Israël a également donné fin 2016 son feu vert à la vente à la compagnie grecque Energean de deux autres champs gaziers, dont les réserves sont estimées à 60 milliards de mètres cubes. L’ensemble de ces réserves gazières ont fait entrevoir l’indépendance énergétique pour Israël et lui ont aussi ouvert la perspective d’exporter son énergie, notamment vers l’Europe, voire de nouer de nouveaux liens stratégiques dans la région.
L’Egypte et Israël ont aussi un intérêt commun : « que le prix du gaz ne s’effondre pas, estime Thierry Bros, de l’Oxford Institute for Energy Studies. C’est un risque, tant on a fait de découvertes importantes en Méditerranée orientale depuis quelques années. Israël n’a pas d’installations de liquéfaction du gaz permettant d’expédier du GNL par bateau vers d’autres régions de consommation. L’Egypte si. Notamment à Damiette dans le delta du Nil, les installations qui s’étaient arrêtées faute de gaz au milieu des années 2000 redémarrent. Les projets d’unités flottantes de liquéfaction du gaz se multiplient. Avec le gisement géant de Zohr rapidement mis en production par l’Italien Eni, l’Egypte va non seulement redevenir une puissance gazière mais un véritable hub gazier, « elle pourra liquéfier du gaz égyptien et du gaz israélien et les expédier aux clients les plus offrants à l’autre bout du monde, comme le font déjà le Qatar, l’Australie et les Etats-Unis. »
En 2017, M. Nétanyahou avait jugé « révolutionnaire » le projet de gazoduc East Med devant relier son pays à Chypre et à la Grèce, à l’issue d’une rencontre tripartite en Grèce. D’un coût de 5,8 milliards d’euros, ce gazoduc devrait acheminer vers l’Europe le gaz découvert au large des côtes chypriotes et israéliennes, réduisant ainsi la dépendance du continent à l’égard de l’énergie russe.
Le développement du projet ne devrait toutefois pas commencer avant plusieurs années, et le pipeline ne serait opérationnel qu’en 2025. Mais il y avait un problème de calendrier pour la montée en puissance de la production égyptienne. « Le gaz israélien peut être livré dès 2019, il vient de tout près, il pourra fournir le secteur pétrochimique égyptien, il alimentera des centrales thermiques au gaz pour fabriquer de l’électricité », dont a fort besoin ce pays de 80 millions d’habitants. « L’apport gazier d’Israël est une sécurité supplémentaire pour l’Egypte », confirme Jean-Pierre Favennec, consultant et professeur à SciencesPo, spécialiste de l’énergie.
Ces richesses naturelles créent également des tensions en Méditerranée : elles sont au cœur d’une dispute entre l’Etat juif et le Liban.
Le Liban a récemment signé son premier contrat d’exploration d’hydrocarbures au large de ses côtes avec un consortium comprenant le groupe pétrolier français Total, l’italien ENI et le russe Novatek. Deux blocs sont concernés, dont une partie se trouverait dans une zone maritime revendiquée par Israël. M. Steinitz a rencontré, dimanche, le secrétaire d’Etat adjoint américain pour les affaires du Proche-Orient, David Satterfield, dépêché par Washington pour tenter de désamorcer le contentieux entre les deux pays.
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