Le parquet financier britannique a récemment annoncé engager des poursuites contre cinq anciens salariés de Glencore. La multinationale de négoce, courtage et extraction de matières premières a déjà plaidé coupable en tant qu’entité auprès des justices américaines et britanniques en 2022.
Chef du trading pétrolier au sein de Glencore de 2007 à 2019, date de son départ, Alex Beard est accusé de corruption par l’agence britannique de lutte contre la fraude (Serious Fraud Office, SFO). Quatre autres ex-responsables, en l’occurrence Andrew Gibson, Paul Hopkirk, Ramon Labiaga et Martin Wakefield, ont également été inculpés dans le cadre des activités du groupe.
La multinationale Glencore a été, pour cela, condamnée à des amendes records. Cette fois, cinq individus dont l’ancien patron de Glencore sont accusés nommément de corruption d’agents publics au Cameroun, au Nigéria et en Côte d’Ivoire pour obtenir des contrats pétroliers entre 2007 et 2014.
Parmi les cinq inculpés, le milliardaire Alex Beard, ancien responsable pétrolier de Glencore qui a fait fortune quand l’entreprise a été cotée en bourse à Londres en 2011.
Le Serious Fraud Office (SFO) l’accuse d’avoir conspiré pour verser des pots-de-vin à des fonctionnaires des gouvernements camerounais et nigérians, ainsi qu’à des employés des sociétés pétrolières publiques de ces deux pays en vue de l’obtention de contrats. Pour le Nigeria, les faits ont été commis entre 2010 et 2014, pour le Cameroun, entre 2007 et 2014.
L’autre ancien haut cadre de Glencore, Andrew Gibson, à être poursuivi, était pendant des années l’adjoint d’Alex Beard. Les trois autres ex-employés poursuivis sont accusés d’avoir participé activement à ce système de corruption qui a touché aussi la Côte d’Ivoire.
Plus de 13 millions de dollars en espèces transportés à bord de jets privés
Selon le SFO, Andrew Gibson et Martin Wakefielf sont aussi inculpés pour la falsification de factures adressées au bureau londonien de Glencore. Des factures présentées comme des frais de service auprès d’un cabinet de conseil pétrolier nigérian, de 2007 à 2011.
Pour Akere Muna, l’avocat camerounais engagé dans la lutte contre la corruption, l’annonce de ces inculpations au Royaume-Uni est un pas important. Car à ce jour, aucune poursuite n’a été engagée au Cameroun contre les destinataires de la corruption avérée et reconnue par Glencore. L’avocat espère qu’en poursuivant, cette fois, des individus et non plus une entreprise, la justice britannique permettra que des noms soient révélés. Une première audience devant le tribunal de Westminster est annoncée pour le 10 septembre.
Au Cameroun, selon le Serious Fraud Office du Royaume-Uni, entre 2012 et 2015, plus de 13 millions de dollars en espèces transportés périodiquement à bord de jets privés ont été utilisés pour corrompre les responsables des sociétés pétrolières et gazières du pays. L’affaire Glencore concerne aussi en Afrique, entre autres, la République démocratique du Congo, le Nigeria et le Soudan du Sud.
Glencore a reconnu en 2022 avoir corrompu des agents de l’Etat camerounais pendant des années.
L’entreprise anglo-suisse Glencore est un géant du négoce de matières premières. Elle a été condamnée en 2022 à payer 321 millions d’euros pour des faits de corruption en Afrique dans plusieurs pays, dont le Cameroun. A ce jour, aucun responsable camerounais n’a été poursuivi dans cette affaire, au Cameroun. Sous la pression de l’opinion publique, notamment, le président Paul Biya a ordonné l’ouverture d’une enquête.
7 milliards de FCFA pour le Cameroun
Glencore a reconnu, en 2022, avoir soudoyé pendant plus de dix ans des fonctionnaires afin d’éviter des audits et d’obtenir des contrats dans plusieurs pays du continent. Ses activités, Glencore les décrit ainsi : « l’exploitation minière, l’énergie et les ressources naturelles, les affaires étrangères, le commerce, l’industrie manufacturière [et] les questions de recyclage ». Au Cameroun, les pots-de-vins avoués par Glencore s’élèvent à plus de 10,6 millions d’euros (7 milliards de FCFA) versés entre 2011 et 2018.
« 7 milliards, c’est ce qu’ils ont payé, mais qu’est-ce que nous perdons ? Dans les documents publiés par l’ITIE, on voit Glencore acheter le pétrole camerounais à 30% en-dessous du prix mondial du pétrole. Et ça, c’est grave ! Annuellement, on est dans les 300 à 360 milliards FCFA par an perdus dans la corruption. Donc la corruption nous prend presque 2/3 de la dette publique. Donc s’il y a un seul problème qu’il faut régler ici, c’est la corruption. » a dit l’avocat camerounais Akere Muna, ancien vice-président de Transparency International.
Par Regard Sur l’Afrique
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