À Madagascar, les forces armées donnent le ton à la veille de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle, prévue le vendredi 1er décembre : « Aucune déstabilisation » ne sera tolérée d’ici là. L’avertissement a été lancé le mercredi 29 novembre, durant une conférence de presse tenue à Antananarivo par des hauts responsables de l’Emmo – Nat, l’entité qui réunit l’armée, la police et la gendarmerie.
« Personne au sein des forces de sécurité ne peut faire de déclaration sans l’autorisation de la hiérarchie ». Le message lancé par le général William Michel Andriamasimanana, ce mercredi 29 novembre, était destiné à être entendu au sein de ses propres rangs. Il pointe un certain nombre de « pressions exercées contre la Haute Cour constitutionnelle » par des éléments des forces armées « à la retraite ou en exercice ». Des pressions également issues de la « société civile ou d’hommes politiques » détaille le général.
« Les perdants doivent accepter la défaite »
Sans donner plus de précisions et à l’approche de la proclamation de la victoire d’Andry Rajoelina, vendredi 1er décembre, les responsables de l’Emmo – Nat ont tenu à lever tout doute. Si onze candidats sur treize ont, d’ores et déjà, annoncé ne pas reconnaître les résultats du vote, eux, assurent se ranger entièrement derrière la HCC. « Nous ne reconnaîtrons comme chef suprême que le président proclamé vainqueur par » celle-ci. Et d’ajouter que « les perdants doivent accepter la défaite ».
Démonstration d’intransigeance
Cette mise au point intervient deux jours après une autre démonstration d’intransigeance avec l’arrestation de deux colonels supérieurs de l’armée, le colonel Randrianirina et le colonel Rampanarivo. Accusés d’incitation à la mutinerie, en vue de préparer un coup d’État, ils sont en ce moment détenus à la prison de Tsiafahy en bordure de la capitale, en attente de leur procès le 16 janvier 2024.
La Haute Cour constitutionnelle étudie les 15 requêtes déposées après la présidentielle
La Haute Cour constitutionnelle a du pain sur la planche. Alors que l’institution doit encore confirmer la victoire d’Andry Rajoelina, réélu chef de l’État au premier tour samedi 25 novembre, elle a reçu depuis pas moins de quinze requêtes. Toutes pointent des irrégularités avant et pendant le vote du 16 novembre. Parmi elles, neuf viennent de l’opposant et député du Sud, Siteny Randrianasoloniaiko, et six autres du président sortant Andry Rajoelina lui-même. Ce dernier estime avoir gagné « plus de voix » que celles attribuées par la Céni.
Pour l’équipe d’Andry Rajoelina, c’est à l’intérieur des bureaux de vote que les irrégularités se sont jouées. Lalatiana Rakotondrazafy, porte-parole de la campagne du président sortant, revendique une victoire du président sortant plus large qu’annoncé :
« Nous estimons avoir gagné plus de voix que celles attribuées par la Céni. Comment pouvez-vous expliquer, par exemple, que dans des bureaux de vote où nous sommes sûrs d’avoir obtenu des voix, on gagne sur les procès-verbaux zéro voix ? C’est pas possible. Mêmes nos délégués à nous n’auraient pas voté pour nous. Nous avons des témoignages qui confirment que dans certains [bureaux de vote] beaucoup de gens ont voté pour nous, or, ce n’est pas reflété dans les documents de vote. »
Le camp d’Andry Rajoelina accuse « certains candidats ». Pour la porte-parole, déposer ces requêtes ne signifie pas remettre en cause les institutions électorales, ni la crédibilité du scrutin. Sans les nommer, elle attribue ces irrégularités à « certains candidats » qui auraient « peut-être soudoyé des délégués » le jour du vote.
À ces six requêtes, s’ajoutent neuf autres venues du camp adverse, celui du candidat Siteny Randrianasoloniaiko. La plupart concerne l’annulation et la contestation des résultats. Il s’agit aussi de pointer des achats de voix faits « aux yeux de tous » par le président sortant avant le scrutin, assure maître Andry Fiankinana, avocat de l’opposant : « À partir du moment où ils [les partisans d’Andry Rajeolina – NDLR] ont également déposé des requêtes, cela ne fait que confirmer et acter les irrégularités que tout le monde, y compris les observateurs nationaux et la société civile, ont relevées. »
Regard Sur l’Afrique et RFI
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